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« Les quartiers prioritaires sont dans une situation d’urgence »

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« Les quartiers prioritaires sont dans une situation d’urgence »

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La Croix : Vous avez signé avec 110 élus et responsables associatifs une « lettre ouverte au président de la République pour l’égalité républicaine de nos quartiers prioritaires ». Pourquoi lancez-vous cet appel aujourd’hui ?Thierry Falconnet : Il y a trois ans jour pour jour, Emmanuel Macron prononçait à Tourcoing un discours dans lequel il annonçait un « grand plan de mobilisation nationale » pour les quartiers prioritaires. C’était un discours très attendu par les élus locaux et le monde associatif qui venaient de se rassembler à Grigny pour protester contre la suppression des contrats aidés et la baisse des dotations destinées aux villes pauvres. C’est à cette occasion que Jean-Louis Borloo a été chargé de faire des propositions pour nos quartiers. Mais son plan, qui anticipait en grande partie la situation d’aujourd’hui, a été balayé six mois plus tard. Il n’en reste aujourd’hui plus grand-chose.Le gouvernement et Emmanuel Macron lui-même ont pourtant affirmé récemment qu’une bonne partie des 48 mesures du plan Borloo avaient été engagées ?T. F. : Quelques mesures ont été mises en œuvre, c’est vrai. Les emplois francs sont en voie de généralisation et les cités éducatives sont mises en œuvre avec succès. Mais il n’en existe que 80, alors que la politique de la ville concerne 853 communes et 1 514 quartiers. Ces mesurettes sont donc insuffisantes, d’autant que la situation s’est nettement aggravée avec la crise sanitaire. Dans toutes les villes pauvres, les indicateurs économiques et sociaux sont au rouge. Pour ne prendre que ma commune de Chenôve, le chômage des jeunes a progressé de 13,4 % entre février et septembre 2020. L’antenne des Restos du cœur a vu sa fréquentation augmentée de 68 % entre le début et la fin de la campagne d’été et l’aide fournie par le Centre d’action sociale a bondi de 78 % entre 2019 et 2020. Nous avons même été obligés de mettre en place une allocation d’aide à la subsistance pour les familles les plus pauvres. Tout simplement pour qu’elles aient de quoi manger !Dans cette lettre, vous ajoutez un autre péril, en écrivant qu’« un autre virus se développe dans nos quartiers et même au-delà : celui du dérochage de la République »…T. F. : Ces deux aspects de la réalité sont liés. La crise économique et sociale est le terreau sur lequel se développent le séparatisme et le repli sur soi. Là où la République est faible, se développent d’autres réflexes de solidarité qui sont tout sauf vertueux. Tout ça, on le sait depuis plus de 20 ans mais on continue à traiter les symptômes et non les causes profondes.Comment faire barrage à l’aggravation de ces crises économique, sociale et citoyenne ?T. F. : Il faut absolument que notre alerte soit entendue car les quartiers prioritaires sont dans une situation d’urgence. Nous demandons que 1 % des 100 milliards d’euros du plan de relance soit sanctuarisé pour les territoires en décrochage. Avec ces sommes, la priorité sera de redonner des perspectives d’emploi et d’insertion dans nos quartiers. Nous souhaitons aussi nous attacher à ce que l’accès aux soins et à la santé soit à la hauteur des besoins, en créant des maisons médicales dans les villes pauvres. Nous demandons aussi la création d’une cour d’équité territoriale chargée de vérifier que chaque responsable public met tout en œuvre pour rééquilibrer les politiques publiques au profit des territoires carencés. Si besoin, les administrations pourraient être sanctionnées si elles sont défaillantes.On peut avoir l’impression que l’argent consacré aux quartiers prioritaires ne change rien ou pas grand-chose sur le terrain. Comment s’assurer qu’il est bien utilisé ?T. F. : Je m’inscris en faux contre ce discours qui vise à accuser la politique de la ville et les quartiers prioritaires de dépenser l’argent public. Je rappelle qu’environ 30 % des personnes qui auraient droit à une aide – RSA, par exemple – ne le demandent pas, simplement parce qu’elles ne sont pas suffisamment accompagnées. Mais pour répondre cela, nous proposons la création d’un Conseil national des solutions composé d’élus, d’associatifs ou de fonctionnaires : il aura vocation à identifier les solutions qui marchent sur le terrain et à les diffuser sur le territoire. Et rendra compte chaque trimestre de ses résultats.

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