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Haïti, un nouveau gouvernement sans renouvellement politique
« On prend les mêmes et on recommence », serait-on tenté de plaisanter si la situation à Haïti n’était pas aussi dramatique. Treize jours après l’assassinat – toujours nimbé de mystères – du président Jovenel Moïse, un nouveau gouvernement s’est formé mardi 20 juillet pour diriger le pays.→ ANALYSE. Haïti, pourquoi tant de malheursÀ sa tête : le premier ministre Ariel Henry. Le médecin de 71 ans avait été nommé à ce poste par le président Moïse avant sa mort et bénéficie du soutien de la communauté internationale. Ancien ministre de l’intérieur puis des affaires sociales et du travail, Ariel Henry est un habitué de la politique haïtienne.Manque de renouvellementTout comme les personnalités politiques qu’il a choisies pour former son gouvernement. « Ce sont toujours les mêmes têtes que l’on retrouve au pouvoir », regrette Jean-Marie Théodat, maître de conférences à l’Université Paris I Sorbonne. Même Claude Joseph, premier ministre propulsé à la tête de l’État haïtien après l’assassinat de Jovenel Moïse, a hérité du ministère des affaires étrangères. Son opportunisme politique, alors que le corps du président n’avait pas encore eu le temps de refroidir, avait pourtant été perçu d’un mauvais œil par la société civile.« Ce gouvernement n’est pas crédible, assène Jean-Marie Théodat. La vidange que la société civile attendait n’a pas eu lieu. » Le manque de renouvellement du personnel politique douche les espoirs d’un renouveau démocratique. Selon le chercheur, Ariel Henry s’est une nouvelle fois appuyé sur « les barons de la politique haïtienne ». Michel Patrick Boisvert a ainsi été reconduit au ministère de l’économie et des finances. Autre exemple : Rockfeller Vincent garde son ministère de la justice.Une transition démocratique mise à malLa société civile ne prend toujours pas part à la gouvernance du pays. Malgré sa légitimité, l’opposante Magali Comeau Denis, coordinatrice de la Commission pour la recherche d’une solution haïtienne à la crise, demeure tenue à l’écart des responsabilités politiques. « Haïti a besoin d’un gouvernement d’union nationale capable de préparer une assemblée constituante mais ce n’est pas le cas », critique Jean-Marie Théodat.→ À LIRE. Haïti : la traque des commanditaires de l’assassinat se poursuitLa perspective d’une rupture avec le fonctionnement oligarchique du pays s’étiole. « Ces personnes ne peuvent pas se transformer en pompiers alors qu’elles ont contribué à mettre le feu au pays », fustige le chercheur. Les funérailles du défunt président sont prévues le 23 juillet mais le renouveau politique attendra.