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La bande dessinée, un art recherché

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La bande dessinée, un art recherché

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En octobre dernier, la bande dessinée est entrée au Collège de France. Pour l’instant, le temps d’un cycle dans le cadre de l’année de la BD. L’essayiste et scénariste Benoît Peeters, éminent tintinologue, y donnait une conférence brillante, historique et analytique, sur le « génie de la BD ». Celui qui est cette année président du jury du Festival d’Angoulême (1) est aussi professeur de fiction graphique à l’université britannique de Lancaster. « Il est ironique que l’Angleterre, dont l’amour pour le 9e art est moins manifeste que celui de la France, m’ait accueilli. Les études universitaires sur la bande dessinée sont très récentes et encore trop peu nombreuses »,déplore Benoît Peeters.Un constat que nuance Sylvain Lesage, maître de conférences en histoire contemporaine à Lille et auteur d’une thèse remarquée en 2015 sur le développement du format album : « L’université s’est emparée de la BD comme champ de recherche depuis les années 1970 grâce à l’émergence de la bédéphilie. Elle l’a toutefois fait de façon éclatée, avec des chercheurs assez isolés, sans laboratoire, sans département de recherche dédié, car la bande dessinée n’est pas une discipline universitaire comme l’est devenu le cinéma. »Où en est cette recherche aujourd’hui ? « Après la phase sémiologique des années 1970-1980, puis celle, historique et culturelle, des années 1990, la recherche se penche maintenant sur la représentation que la bande dessinée donne d’une civilisation tandis que d’autres interrogent la place de cet art dans les études littéraires », résume Julien Baudry, chartiste qui a mené une étude sur la jeune recherche pour Comicalités, revue scientifique en ligne sur la culture graphique.Il a recensé une cinquantaine de chercheurs francophones en activité, dont une moitié de Français, tous réunis au sein d’une association, La Brèche. « La France accuse toutefois un retard par rapport à d’autres pays, comme la Belgique ou la Suisse, qui disposent de laboratoires », regrette Thierry Groensteen, éminent historien de la bande dessinée qui vient de publier une somme sur la question (2).Le nombre de thèses sur la BD ne cesse d’augmenter mais il reste inférieur à celui consacré à d’autres champs de la culture populaire plus récents comme les jeux vidéo. « Lors des soutenances, il est difficile de trouver des spécialistes et les jurés commencent souvent leurs interventions en disant : “Je ne connais rien à la BD, mais…” », s’indigne Thierry Groensteen qui se définit comme chercheur indépendant.« Les dossiers les plus classiques sont favorisés par les comités de recrutement, donc mieux vaut avoir fait une thèse sur Shakespeare que sur les comics », observe Isabelle Licari-Guillaume, maîtresse de conférences en études anglophones à Nice, dont la recherche porte sur les bandes dessinées américaines. « Les étudiants craignent aussi d’être soupçonnés par leurs professeurs de choisir une solution de facilité », ajoute Blanche Delaborde, qui a soutenu une thèse sur les onomatopées dans les mangas en 2019.Mais le regard change. « Il y a un effet de génération, estime Sylvain Lesage. Les jeunes chercheurs ont grandi en lisant des mangas, puis des romans graphiques. » La recherche sur la BD se paie parfois même le luxe, à l’image des ouvrages de l’Américain Scott ­McCloud, d’analyses théoriques en… bande dessinée !

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