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quelle sécurité pour les portables du président ?
« Le problème n’est pas la disponibilité des outils de protection contre les cyberattaques, c’est leur utilisation », assure Nicolas Arpagian, enseignant à l’école de guerre économique et auteur du livre La cybersécurité. Le chercheur fait référence aux téléphones ultrasécurisés « Téorem », conçus par l’entreprise française Thales et mis à la disposition du président et de ses ministres pour échanger des informations sensibles. Plus complexe à manier, le dispositif est connu pour être la plupart du temps boudé par Emmanuel Macron, au profit de ses deux iPhone personnels, présents sur de nombreuses photos officielles.→ DÉBAT. Pegasus : nos dirigeants sont-ils imprudents avec leurs portables ?Pour sécuriser ses conversations avec ses ministres ou collaborateurs, le président utilise, selon Libération, des messageries cryptées du type Telegram ou Signal, qui permettent le chiffrement de bout en bout du contenu des messages échangés.« Sauf que ces messageries ne sont pas efficaces contre les logiciels espions du type de Pegasus, qui s’infiltre à l’intérieur d’un téléphone, explique Nicolas Arpagian. C’est comme si le logiciel pouvait lire ce qui s’affiche sur l’écran. »« Le politique passe avant la technique »En théorie, l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) et la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), les deux autorités compétentes en termes de cyberprotection des équipements du gouvernement, peuvent régulièrement expertiser et protéger les téléphones utilisés par les ministres et le président. « Encore faut-il que la personnalité publique accepte que son téléphone soit décortiqué, nuance Nicolas Arpagian, et que l’on fouille dans ses informations privées ou sensibles. »→ DOSSIER. Affaire Pegasus : tout comprendre à cette affaire de cyberespionnageEn France, rien n’oblige les membres du gouvernement à utiliser le matériel sécurisé officiel, ou à faire contrôler leurs téléphones ou ordinateurs personnels. Au contraire d’autres pays, comme les États-Unis, « où en 2017, Hillary Clinton était mise en cause par la justice pour avoir utilisé une adresse mail personnelle, et non l’adresse officielle réglementaire, pour discuter de sujets d’État », rappelle l’enseignant.Le gouvernement américain contraint en effet ses ministres et hauts fonctionnaires à faire usage de matériel et de messageries hautement sécurisées, dont chaque message est récupéré et archivé à la bibliothèque du Congrès, « à des fins historiques, mais aussi pour les tenir responsables, précise Nicolas Arpagian. Ce sont deux cultures politiques différentes : en France, c’est le politique qui passe avant la technique. »Après un conseil de défense « exceptionnel » sur l’affaire du logiciel espion Pegasus ce jeudi 22 juillet, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a annoncé qu’« un certain nombre de protocoles de sécurité ont été réajustés, notamment autour du président de la République », qui a selon Franceinfo fait changer son numéro, ainsi que son téléphone.