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« Aucun de ceux qui étaient là n’a échappé à ce qui s’est passé »

« Aucun de ceux qui étaient là n’a échappé à ce qui s’est passé »

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« Aucun de ceux qui étaient là n’a échappé à ce qui s’est passé »

Ce sont les survivants de Charlie. Ceux qui sont toujours là pour raconter. Avec leurs mots, leurs larmes, leur pudeur et leur vie toujours sacrément cabossée. Même plus de cinq ans après. « Un tsunami émotionnel », dit la journaliste Sigolène Vinson. « Quand on n’a jamais vécu ça, on ne sait pas pourquoi on pleure d’un seul coup », ajoute la dessinatrice Coco. Des témoins de l’horreur, partagés entre le besoin de raconter et le refus de toute mise en scène de leur malheur personnel. « Je suis tiraillé car je n’ai aucune envie d’offrir ma douleur à ceux qui ont fait cela. Et aucune envie, non plus, de cacher les conséquences de leurs actes », explique Simon Fieschi, le webmaster du journal, grièvement blessé lors de l’attaque du 7 janvier 2015.

Après avoir fait projeter, lundi 7 septembre, des images glaçantes de la « scène de crime », cette inconcevable tuerie dans la salle de rédaction de Charlie Hebdo où dix personnes ont été « exécutées » en moins de deux minutes, la cour d’assises de Paris a entendu mardi 8 et mercredi 9, celles et ceux qui étaient là, ce matin de janvier, pour la première conférence de rédaction de l’année.

Beaucoup ont d’abord souhaité raconter « l’ambiance joyeuse » qui régnait ce 7 janvier. « Cabu était hilare » et « Tignous était venu plus tôt car, ce matin-là, il avait emmené ses enfants à l’école », se souvient Sigolène Vinson. Une façon de se rappeler que, quelques secondes avant le drame, Charlie, c’était encore ce mélange habituel de sérieux et de rigolade. Avec ses empoignades verbales autour de l’actualité et les blagues incessantes de cette « bande » de dessinateurs et de journalistes qui estimaient que rire, c’était une manière de rester en vie. « Des gens d’une extrême gentillesse avec un vrai regard sur le monde, une intelligence, une manière d’être drôle », dit Coco. « Charlie, c’était ma deuxième­ maison », ajoute Angélique, la responsable des abonnements.

Puis vient le moment de parler de l’indicible. La voix brisée, Coco raconte ce moment où les frères Kouachi l’ont obligée, sous la menace de leurs kalachnikovs, à ouvrir la porte du journal. « J’étais dévastée, dévastée. J’ai eu une pensée fulgurante pour ma petite fille. J’étais comme dépossédée de moi », murmure la dessinatrice.

La suite, ce sont le bruit saccadé des armes et le « silence de mort » une fois les terroristes repartis. Cette incrédulité de se retrouver vivants, « hébétés », au milieu des morts alors que tous, cachés sous un bureau ou sous une table, ont eu la conviction qu’ils allaient mourir. « J’avais accepté la mort à ce moment-là. J’ai pensé à mes proches, au fait qu’ils seraient tristes. J’ai pensé que mourir, comme ça, d’une balle dans la tête, cela serait rapide », raconte Sigolène Vinson, finalement épargnée par les terroristes.

Des survivants, pas des rescapés. C’est Simon Fieschi qui, de sa voix douce et posée, fait la distinction. « Cela me fait tout drôle quand j’entends que nous sommes des rescapés car cela implique que nous avons échappé à ce qui s’est passé, dit-il. Or, aucun de ceux qui étaient là, n’a échappé à ce qui s’est passé. » Et c’est bien ce qui frappe dans tous ces récits. La sidération puis les plaies psychologiques béantes que provoque la confrontation brutale avec la violence terroriste. Y compris chez ceux qui n’étaient pas dans les locaux du journal mais qui sont, eux aussi, des survivants de Charlie.

Par exemple, ces hommes et femmes qui se trouvaient dans deux sociétés voisines où les frères Kouachi ont fait irruption dans les secondes précédentes. En tirant sans toucher personne. « Aujourd’hui encore, j’ai peur qu’on me tue », dit une cadre, licenciée des mois après les faits, comme plusieurs autres, en raison de son incapacité à reprendre le travail. Et à la barre, ce sont les mêmes mots qui reviennent. Cauchemars, insomnies, hypervigilance, peur de la foule et du moindre bruit. La culpabilité d’être vivant et de continuer à aller mal, sans jamais avoir été touché physiquement. « On m’a dit : mais tu n’as pas pris de balle, elle est allée dans le plafond », dit cette cadre. Le drame intime des « blessés sans blessures apparentes », dit Cécile, l’éditrice de Charlie.

 

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