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L’amour propre
Doit-on s’aimer soi-même ? La question peut sembler saugrenue. N’est-ce pas l’évidence même ? Il faut un minimum et de confiance et d’estime de soi pour se risquer à aimer. « Tu aimeras ton prochain comme toi-même », rappelle Jésus quand on l’interroge sur le premier des commandements.Pourtant, la tradition spirituelle et philosophique s’est longtemps méfiée de ce que saint Augustin appelait l’amor sui et Pascal, l’amour-propre. « La nature de l’amour-propre et de ce moi humain est de n’aimer que soi, et de ne considérer que soi », lit-on dans les Pensées. Dans le même temps, l’égoïste qu’est l’homme ne peut ignorer que « cet objet qu’il aime ne soit plein de défauts et de misère ». Mais c’est une vérité à laquelle il ne peut consentir. Il se ment donc à lui-même. Or, pour les moralistes et romanciers du XVIIe siècle, se mentir à soi-même est le pire des mensonges. Sans compter que celui qui n’aime que soi se coupe de Dieu – qui est la source de l’amour – et des autres.Aujourd’hui, les sciences humaines portent un regard plus positif sur l’amour de soi, qui n’est pas synonyme de narcissisme. Le pape François s’en fait écho dans son exhortation La joie de l’amour. « Une certaine priorité de l’amour de soi-même peut se comprendre seulement comme une condition psychologique, en tant que celui qui est incapable de s’aimer soi-même rencontre des difficultés pour aimer les autres. » Mais le risque du narcissisme n’est en effet jamais complètement écarté, surtout dans une culture où des personnes font l’expérience d’une grande fragilité affective. Or l’amour véritable est celui qui est capable de dépasser l’amour de soi, pour mettre le bonheur de l’autre au-dessus de ses propres désirs et besoins.